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Comment construire avec les ressources à disposition localement ?

Pour cet épisode du podcast, je suis partie à la rencontre de Clara Piolatto qui est cofondatrice du projet architectural FAIRE AVEC. Je suis très contente de ce podcast car en plus d’être passionnant, c’est le premier sur la filière bâtiment. Cela nous permet donc de l’inscrire dans la suite de mon travail sur l’économie circulaire et le bâtiment, ou .

 

Architecte de formation, Clara Piolatto a commencé l’aventure « FAIRE AVEC » il y a plus d’un an avec Clotilde Buisson et Gwenaëlle Rivière lors de l’appel à projets urbains innovants « Faire » du Pavillon de l’Arsenal. Les trois fondatrices ont des expertises complémentaires et ont souhaité rapprocher le pôle « réemploi » et le pôle « mal logement », dans une seule et même offre.

FAIRE AVEC est un « collectif d’architecture qui mise sur la maîtrise d’œuvre comme moyen pour mettre en lien des ressources et des besoins ».

Pour comprendre ce projet associatif et son histoire, il suffit de repartir de deux constats :

> Celui du gaspillage dans le secteur du bâtiment : une offre avec des déchets qui ne sont pas exploités
> Celui du mal logement : une demande non assouvie pour des questions budgétaires car les usagers sont des ménages dit précaires, ou alors pour un problème simple de manque de considération

Aujourd’hui il y a donc un écart entre l’offre de ressources non-exploitées qui sont abondantes, et la demande et les besoins en logement. Et pour répondre à ce défi, c’est un changement de paradigme qu’il faut, ce sont de nouvelles habitudes à prendre.

 

 

En tant qu’architecte et/ou professionnel.le de la filière bâtiment, ces bonnes habitudes à prendre sont :
> aller chercher des matériaux sur des plateformes de réemploi existantes (comme Phenix) plutôt que chez des fournisseurs traditionnels.
> Impliquer les utilisateurs dans la démarche de conception.
> Changer de regard et de vocabulaire pour parler plus social et environnemental qu’uniquement « rentabilité économique ».
> Bien se concentrer et passer du temps sur la phase amont de l’identification des besoins.
> Identifier et valoriser les ressources qu’on a déjà à disposition localement, sur les terrains par exemple.

 

Ce n’est pas possible qu’il y ait des gens et des logements qui ne valent rien.

 

La question du mal logement

Pour s’adresser aux personnes en situation de mal logement, FAIRE AVEC est reparti des fondements de l’Architecture : « une mise au service d’une qualité Architecturale pour tous ». Dans cette démarche l’Architecte est au service du plus grand nombre, pour que la qualité d’usage soit accessible à tous.

Trop souvent appelée Architecture Sociale, cette démarche devrait être pour Clara l’Architecture « tout court ». Leur démarche n’est en effet pas misérabiliste mais elle consiste bien à créer de la valeur à partir de quelque chose qui n’est pas monétaire à la base.

Pour ce dernier point, Clara n’hésite pas à rappeler que le seul argument économique dans une démarche architecturale n’est pas valable. Et de nouveau, c’est une question de posture et de bon sens. Face à la question « est-ce que vos projets coûtent moins chers ? » elle répond « oui, pour la planète. »

Pour faire en sorte de répondre le mieux possible aux besoins, Clara propose également d’ouvrir le chantier aux passants, de multiplier les usages et profils des bénéficiaires pour renforcer le lien social. Mais aussi d’intervenir au plus tôt dans le processus.
Par exemple, lorsqu’elles ont travaillé sur un projet de centre d’hébergement, elles ont fait la maquette dans le réfectoire du centre en accueillant les personnes souhaitant se joindre à eux. En d’autres termes, elles ont fait directement sur place et impliqué le bénéficiaire dans la maquette ou la conception : de cette manière les infos sont à disposition instantanément, et les feedbacks sont immédiats.

En tant qu’Architecte on a tendance à oublier que le moment de la construction, est l’un des moments les plus importants dans la vie de quelqu’un. Elle souhaite donc valoriser ce moment.

 

On travaille avec des matériaux, d’où ils viennent ce n’est pas la question. Ça devrait être une filière commune pour tous ces types de matériaux : celle des matériaux.

 

La question du réemploi

Dans les matériaux de récupération elles utilisent aujourd’hui des matériaux neufs plus que de seconde main. Et ces matériaux sont nombreux : rebus, surplus, erreurs de commandes sur les chantiers, matériaux avec des dégâts minimes qui empêchent la livraison mais peuvent être utilisés (sans problème de garantie)… En utilisant des matériaux neufs, cela leur permet entre autre de s’extraire de la remise en conformité des matériaux, qui est aujourd’hui un frein à l’action.

Cela leur permet aussi d’éviter la stigmatisation d’un réemploi qui ne serait dédié qu’aux situations de précarité. L’objectif est de faire en sorte que des matériaux non valorisés à la base ne soient pas dédiés qu’aux usages précaires et à l’inverse, que des usages précaires puissent avoir à disposition des matériaux de luxe ou neufs.

Un exemple ? Un centre d’hébergement a récupéré des matelas d’un hôtel de luxe.

 

Cette démarche n’est pas sans risque. En faisant émerger cette filière, le risque est que ces matériaux de réemploi, de fins de séries ou les rebus finissent par prendre de la valeur et devenir très chers. Il faut donc faire attention à valoriser sans oublier l’objectif premier de le rendre accessible à tous.

 

Et la valeur ajoutée dans tout ça ?

Avec FAIRE AVEC, la valeur ajoutée se veut aussi humaine que matérielle.

Aujourd’hui dans la filière bâtiment en France, les fournisseurs sont également poseurs. C’est pour ça qu’ils valorisent les matériaux sur lesquelles il prennent un marge, plus que le savoir-faire ou le temps homme. Avec FAIRE AVEC elles souhaitent distinguer la fourniture de la pose.

 

Pour aller plus loin :

En ce moment, FAIRE AVEC travaille sur un projet d’écolieu dans l’Aisne.

 

  • Elle parle des compagnons bâtisseurs, de qui elles se sont inspirées. Aujourd’hui elles complètent leur démarche en intervenant en amont avec FAIRE AVEC.
  • Dans ses inspirations, elle cite Patrick Bouchain et Umberto Riva
  • Elle nous fait découvrir La table d’Aude, un projet porté par Hyper Voisins, à côté du centre d’hébergement des Grands Voisins

 

Merci Clara !!

Pour rappel :FAIRE AVEC ne récupère pas les matériaux.

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